F1, Nascar : ces triathlons qui parcourent des circuits automobiles
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- jeudi 23 août 2018
Magny-Cours, Daytona 500, Castellet, Gilles Villeneuve, Philip Island (...) sonnent familièrement dans le monde des courses auto-moto prestigieuses. Pourtant, ces huit dernières années de plus en plus de triathlons se sont apropriés ces circuits. Et intègrent souvent pour la partie vélo, parfois même en course à pied, de prestigieux circuits de formule 1 ou Nascar...
Le phénomène commence à prendre en France avec l'épreuve trentenaire du triathlon de Nevers qui a intégré il y a cinq ans déjà le tour de piste de Magny-Cours. Cette année, Tours s'y est mis avec le circuit Nascar Tours Speedway alors que Toulon Var Triathlon rate de peu la marche du triathlon du Castellet... Retour sur ce phénomène international !
Top, déclenchez les chronos ! Ce n'est pas qu'une formule qu'ont encore pu éprouver les 300 participants du triathlon M de Magny-Cours, le 12 août dernier. En effet, les organisateurs de Nevers Triathlon, qui aspirent à une plus forte attractivité de leur épreuve, ont intégré un classement spécifique avec un deuxième temps chronométrique pour le vélo pour le tour de piste de formule 1. Une course dans la course. « Notre ancien président, Bertrand Decoster était en contact avec les responsables du circuit de formule 1 de Magny-Cours. Et il lui a paru doublement intéressant d'y faire passer notre triathlon, pour la promotion et la diversification du circuit de Magny-Cours... Mais surtout pour le côté attractif auprès des triathlètes », résume Benoît Delaporte, l'actuel organisateur.
La stratégie a été bonne. Puisque la première année de ce nouvel aménagement, le nombre de participants est passé de 180 à 250, en 2014. L'ambition reste toujours plus grande pour Nevers Triathlon en 2019, qui a d'ores-et-déjà réussi dans sa stratégie de séduction, avec 300 concurrents cette année en full et relais sur le M et plus de 200 sur le S. Récompenses, cadeaux et plaisir de l'épreuve attirent tant au niveau de la Nièvre que des triathlètes internationaux.
« Nous voulions certes récompenser les meilleurs, précise Benoît Delaporte, mais également les autres participants. Dans ce sens, nous avons misé sur des récompenses pour les premiers, pour les meilleurs sur le tour de piste de Magny-Cours, pour le challenge des triathlètes de la Nièvre ou à travers des tirages au sort. En jeu, un stage de pilotage de F3, des baptêmes de tour de piste, des séances de cryothérapie... Chaque année, notre organisation est de mieux en mieux structurée. Grâce au soutien de nos partenaires, à commencer par le circuit de Magny-Cours ou LSP pilotage, mais aussi avec nos nombreux bénévoles qui n'hésitent pas à interrompre leurs vacances pour être présents pour la course, la préparation et la remise en état du site... »
Speedway à Tours, le Castellet à Toulon...
Sur les traces de Nevers Triathlon, l'organisation de la première édition du Toursnman cette année a été l'occasion d'inaugurer les 600 mètres de piste du circuit Nascar de Tours, le Tours speedway. Certes, plus modeste à côté des 5 kilomètres de piste de Magny-Cours, la boucle du circuit au tout début du vélo, au sortir du parc, donne un vrai goût de compétition pour le L ou le XXL.
Cette « petite surprise » de l'épreuve, prévue par son organisateur Fabien Caillé, est même à repasser à mi-course sur le XXL, donnant des ailes avant de repartir pour la deuxième boucle de 90 km au charme ponctué par les châteaux de la Loire. Créé en 2012, le Tours speedway, habituellement terrain de jeu de bolides en fibres de carbone et métaux ultra-légers, a laissé la place en juin dernier à des vélos, parfois en carbone, mais avec beaucoup moins de fumées blanches sous la gomme, même si les watts ont bien été envoyés...
Dernière initiative en date, celle du triathlon sprint par équipe de Toulon était prévue le 23 septembre 2018 sur le circuit du Castellet. Mais les gestionnaires du circuit peinent à mettre en place l'épreuve... « Cela fait deux ans que nous essayons de lancer ce triathlon, regrette Medhi Quill, le président du club Toulon Var Triathlon. Notre dossier est béton, le président du circuit y est favorable mais son organisation a du mal à suivre. Pourtant, nous avons tout : le plan d'eau à côté et trois routes en forme de triangle autour du circuit du Castellet pour un final du vélo sur la piste de 5 kilomètres. Notre dossier est complet. Mais malgré nos tractations depuis deux ans, nous avons dû annuler l'organisation fixée le 23 septembre 2018... »
L'organisateur ne baisse pourtant pas les bras. Car, si le prestige d'une épreuve sur le circuit du Castellet constitue un atout, d'autres motifs plus impérieux l'y encouragent également : « il est de plus en plus compliqué d'organiser une épreuve de triathlon, en particulier dans le Var. Les autorisations préfectorales et les contraintes de sécurité sont de plus en plus exigeantes et alourdissent considérablement l'organisation. C'est pourquoi la course autour du circuit est réellement une bonne stratégie... »
Medhi Quill voit déjà grand. Car après l'organisation du triathlon sprint par équipe, qu'il appelle de ses vœux, il verrait bien se tenir d'autres épreuves plus complètes avec l'ADN du Castellet.
Abu Dhabi, pionner du triathlon sur circuit de formule 1
Étape du circuit international ITU de triathlon, le triathlon d'Abou Dhabi a été réellement construit autour de la piste de formule 1 Yas Marina et du plan d'eau, à proximité. Depuis 2008, l'évolution du format et la multiplication du nombre d'épreuves ont toujours gardé le circuit de 4 km comme centre de gravité. Au point, que chacune des quatre boucles de vélo pour le triathlon L parcourt la Marina Yas racetrack. Soit quatre tours de circuit.
Un des pionners, il a ainsi suscité de nouvelles vocations, chacun cherchant à valoriser la proximité de telles pistes comme le remarque Medhi Quill, de Toulon : « il est naturel que chaque organisateur s'interroge à un moment sur l'opportunité d'intégrer dans son organisation un passage sur circuit, lorsque celui-ci est à proximité. Je me demande même pourquoi le triathlon du Mans n'y passe pas alors que des 24 heures cyclistes y sont programmés... »
C'est d'ailleurs bien le sens de l'histoire. Puisque le challenge Daytona 500 (half-Ironman) sera organisé pour la première fois en décembre prochain, en Floride, sur la fameuse piste Nascar américaine. Les quatre kilomètres du Daytona international speedway s'ouvriront le 9 décembre pour offrir aux triathlètes une nouvelle expérience, en espérant que ceux-ci ne jouent pas au stock-car, dont l'origine vient de la prohibition et des traffics de contrebande aux États-Unis...
« Nager en mer et rouler sur un circuit de formule 1 » : voilà encore un argument, cette fois-ci du triathlon de Zandvoort aux Pays-Bas, pour une première édition 2018 sur circuit qui s'est déroulée en juin dernier avec 700 participants. Format S ou M, les participants roulaient sur le circuit de Zandvoort. Réellement ancré sur piste, ce triathlon porté par Amsterdam Sport Events a lui aussi fait le pari du croisement entre triathlon et terrain de course automobile.
En effet, sur le sprint, les triathlètes ont bouclé quatre fois le circuit de 4,2 km alors que sur le distance olympique, l'expérience a été poussée jusqu'aux neuf tours. La course à pied conduisant ensuite les concurrents le long du bord de mer... « Un triathlon à la fois en mer et sur circuit automobile était l'un de mes projets, explique l'organisateur, Lars Vreugdenhil. C'est unique pour les Pays-Bas, où nous sommes d'ailleurs les seuls à organiser l'épreuve sur une piste de formule 1... »
Avec ses 21 tours de pistes du circuit de formule 1 Gilles Villeneuve, l'Esprit triathlon L de Montréal a lui tout misé sur la vitesse et la sécurité. C'est le dinosaure des triathlons sur circuit de formule 1 puisque il organise cette année, en septembre, sa 34ème édition ! Une initiative lancé par Danny McCann, à l'époque, en l'absence de triathlon à Montréal.
Le circuit québécois est réputé très rapide en dépit de virages en épingle qui ralentissent fortement la progression après les longues lignes droites. Mais ce n'était pas les seuls critères qui ont présidé à sa création, comme le raconte Sophie McCann, directrice adjointe du triathlon Viva Esprit de Montréal : « le circuit Gilles Villeneuve offre la meilleure sécurité pour les athlètes. Le parcours est complètement fermé à la circulation. Il est beaucoup plus facile de garder un parcours "étanche" sans aucun risque extérieur (e.g. un automobiliste "brise" la garde de sécurité). Autre avantage, les athlètes sont toujours "entourés" de supporters qui les encouragent. Pendant les parcours de vélo plutôt longs, il n'y a pas de spectateurs sur les grandes distances. Autre avantage, le parcours est plutôt plat, donc les athlètes peuvent se donner à fond et focuser sur leur vitesse. »
Sophie McCann n'y voit qu'un inconvénient : l'impression de tourner en rond pour les triathlètes qui apprécient les paysages lors du vélo. Une sensation de tourner en rond sur le circuit de 4,4 km, que des athlètes longue distance ne recherchent pas forcément... Concentré sur l'île Notre-Dame, en bordure de la capitale québécoise, ce triathlon ouvre également l'expérience à d'autres formats de triathlon (M, S), tous organisés sur le circuit. La natation se fait dans le bassin d'aviron à proximité du circuit que contourne également la course à pied...
Repris en 2017 par le label Ironman 70.3, le triathlon de Cascais, au Portugal, a lui fait un autre pari pour ses 90 km de vélo ! Passant aux abords de l'écrin magnifique du parc naturel de Sintra, celui-ci alterne passage sur le circuit de F1 d'Estoril et côtes dans le massif encaissé de la région, avant de retourner vers la station balnéaire réputée de la banlieue de Lisbonne. Parmi un des plus anciens, avec son passage sur le circuit d'Estoril, il présente cependant un inconvénient. En effet, avec la chaleur estivale, le bitume tend à fondre, ce qui rend alors le passage sur circuit moins excitant.
À Cascais, il y a toujours quatre kilomètres à parcourir, mais une seule fois. Pour plus de variété...
Une formule difficile à tenir !
Montréal, Abu Dhabi et Nevers font figure de prou. Car ces trois épreuves ont réussi à maintenir le passage sur circuit de formule 1, respectivement depuis 35, 10 et 5 ans. Une performance compte tenu du nombre d'épreuves qui ont dû abandonner cette formule. À commencer par le seul triathlon au format Ironman de Belgique qui avait tout misé sur l'attrait du « plus beau circuit de formule 1 du monde », pour se doter son épreuve d'une véritable notoriété et des triathlètes friands de F1. Tellement beau que pour sa sixième édition, cette année, le bien nommé Belman s'est vu subtiliser cette couronne de béton bitumineux.
« Au fur et à mesure des années, nous avons dû revoir le passage sur la piste de Spa-Francorchamps, le must des circuits de formule un », témoigne Arnaud de Meester, triathlète de l'extrême et fondateur de l'épreuve. « Car, les six tours de circuit étaient assez éprouvants pour les triathlètes. Mais ce passage restait néanmoins le point culminant de l'épreuve. Aussi, avions-nous établi avec les organisateurs du circuit de Francorchamps un contrat sans date de fin... Malheureusement, lorsque Mac Laren a décidé de louer nos créneaux, nous n'avons pas fait le poids. Il ne restait que des périodes trop tardives dans la saison pour assurer un tel événement. »
Le Belman a donc dû supprimer le passage sur le circuit de de Spa-Francorchamps, cette année. Gage ensuite pour les organisateurs de trouver un nouveau pôle attractif. « Les triathlons et triathlètes sont toujours à la recherche de beaux sites ou de caractéristiques séduisantes, par exemple, rouler comme une formule 1. Aujourd'hui, nous regardons pour la traversée de Bruxelles. Mais c'est compliqué, car tout est politique en Belgique », pointe Arnaud de Meester. Afin d'assurer sa stature internationale, le Belman a décidé cette année de rejoindre le label Ocean Lava Planet.
Plus loin, en Océanie, un autre grand événement de triathlon tournait jusqu'à l'an passé sur le circuit de formule 1 australien Philip Island. Trois années durant, en effet, l'organisation proposait des épreuves multisports adossant aux triathlons d'autres épreuves comme la course à pied. Le Philip Island multisport racetrack a cependant dû être annulée cette année. Et d'ores et déjà aussi en 2019. Le circuit du grand prix australien a pourtant accueilli, sur ce festival multisport, tous les publics depuis trois années...
Green Hell triathlon
Et si l'enfer, c'était de faire un triathlon uniquement sur circuit de formule 1 ? Dans le cas du Nürburgring triathlon, près de Cologne en Allemagne, il ne s'agit pas, dans ce cas, de n'importe quel circuit de formule 1. En effet, les 21 kilomètres du Nürburgring Nord, surnommé l'enfer vert avec ses 73 virages par le monde de la F1, est considéré comme l'un des plus durs au monde. Avec des dénivelés frôlant les 20 %, il présente également un degré d'exigence inhabituel. Loin des dénivelés habituels des autres circuits de la planète.
C'était donc un gros pari pour Jeschke & Friends Events qui programmait rien de moins, après les 1 500 m de natation, que les 60 km de vélo avec trois tours du circuit de F1 de Nürburgring nord, soit 1 700 mètres de dénivelé positif et des parties de 2 km à 12 %... Avant d'enchaîner les 11 km à pied sur le deuxième circuit, plus court et plus plat, construit plus récemment, et qui a accueille lui aussi des courses de F1. Tandis que le circuit nord a été délaissé par la F1, au profit d'autres courses d'endurance automobile, car considéré comme trop dangereux.
Le triathlon de l'enfer vert, le Nürburgring, n'aura eu qu'une édition, en 2012. Pourtant, il avait toute les caractéristiques, au cœur du massif forestier de l'Eifel, avec un circuit de F1 technique et exigeant sur le vélo, un second plus accessible pour la course à pied, pour séduire un grand nombre de triathlètes...